L'action personnelle du créancier contre le représentant légale de la société en liquidation
-D’une manière générale, un créancier ne peut agir en responsabilité contre le représentant légal de la société de manière personnelle car un monopole d'action existe au bénéfice du liquidateur.
En effet, suivant les dispositions de l'article L.641-4, alinéa 4 du code de commerce, lequel renvoie expressément aux dispositions de l'article L.622-20 du même code, seul le mandataire judiciaire a qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers, à peine d'irrecevabilité qui peut être relevée d'office par la juridiction.
À ce titre, la Cour de cassation a retenu très clairement :
«Attendu que, dès lors que le syndic, représentant la masse des créanciers, exerce l'action en réparation du préjudice résultant de la diminution de l'actif ou de l'aggravation du passif du débiteur causé par la faute d'un tiers, auquel il est reproché d'avoir, par ses agissements, retardé l'ouverture de la procédure collective, aucun créancier ayant produit n'est recevable à agir lui-même contre ce tiers en réparation du préjudice constitué par l'immobilisation de sa créance, inhérente à la procédure collective à laquelle il est soumis, et, notamment, par la perte des intérêts ;
Attendu que, pour déclarer recevables les actions individuelles des créanciers, la cour d'appel, qui a constaté que le fait dommageable dont ceux-ci se prévalaient n'était pas distinct de celui qui avait fondé l'action du syndic, a énoncé que ces créanciers étaient recevables à agir à titre individuel contre le tiers responsable pour obtenir la réparation de leur préjudice personnel distinct de celui dont le syndic peut, au nom de la masse, demander réparation ;
Attendu qu'en décidant qu'entraient dans le préjudice personnel les dommages résultant de l'immobilisation des créances, nés de la faute du tiers et, notamment, la perte des intérêts, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui découlaient de ses constatations, a violé le texte susvisé ; » (assemblée plénière, 9 juillet 1993, n° 89–19.211, bulletin 1993 1.b. n° 13 page 21).
À de multiples occasions, la chambre commerciale de la Cour de cassation a eu l'occasion de confirmer ce principe (com. 28 janvier 2014 n° 12–27.901 ; com. 19 décembre 2018, n° 17–13.846 ; com. 16 janvier 2019, n° 17–17.210).
Néanmoins, dans certaines hypothèses, le créancier peut agir directement en responsabilité contre le représentant légal, à la condition qu'il caractérise une faute détachable des fonctions de la part du dirigeant et surtout un préjudice distinct de la masse des créanciers car autrement, nous retombons sur le monopole du liquidateur pour agir.
Dans un arrêt récent, la chambre commerciale de la Cour de cassation a retenu la possibilité pour un cédant de parts sociales qui devait percevoir une rémunération au titre d'une mission d'accompagnement au profit d'un cessionnaire, qui suite à l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société concernée n'a pu percevoir les commissions d'accompagnement et dans ce cas d'espèce, la chambre commerciale de la Cour de cassation a retenu récemment un intérêt personnel du créancier (com. 8 septembre 2021, n° 019–13.526).
Maxence Perrin
Avocat à Dijon en droit commercial
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